vendredi 21 août 2009

LA MENACE DU SANS TRAVAIL.

Chronique d'abonnés . LE MONDE.
La menace du sans travail par thierry c.
18.08.09
Il ne fait pas de doute que nous ne sommes plus dans une société du travail.
Si les trente-cinq heures et les congés payés ont pu faire scandale au moment ou ils ont été adoptés, il est bien peu de personnes pour les remettre en cause aujourd'hui. Mieux, plus personne ne parle aujourd'hui de renvoyer les enfants à l'usine ou au champs comme c'était la genéralité il y a seulement cent cinquante ans.
Dans une certaine mesure nous avons donc pris acte du fait que le travail humain tendait à disparaître et que la productivité des salariés occupés étaient aujourd'hui, dans notre pays, une des plus élevée au monde. Nous n'avons plus besoin de travailler aussi longtemps pour produire autant de biens et dans bien des cas la main d'oeuvre disponible n'est plus vraiment nécessaire. Autrement dit, nous sommes passés d'une société de travail et d'efforts à une société de loisir et de temps libre.
Or ce qui me surprend, c'est de voir que dans l'imaginaire collectif, le travail garde une place prépondérante dans l'organisation des rapports sociaux. Nous continuons, comme nous le faisions encore dans les années 1960, à nous définir par le travail et nos fonctions à l'intérieure de la société., comme si il n'y avait que le travail.
Qu'importe qu'en cent cinquante ans le travail se soit raréfié, voir définitivement anémié, nous refusons obstinément d'en tirer les conséquences en matière de rémunération et de partages des richesses. Nous continuons de prétendre et de manière mensongère, que seul le travail justifie le revenu et la position sociale. Nous affirmons encore avec force que les travailleurs constituent la seule force à opposer au capital, et pire encore, même si nous avons lutté pour obtenir une protection sociale, celle ci s'adosse, encore et toujours, sur un prétendu monde du travail qui n'existe plus.
Une telle erreur est à mon sens historique, dans la mesure ou nous refusons obstinément de voir qu'entre le monde du travail et celui du capital, une troisième force est en train d'émerger, un Tiers Etat, qui ne participe ni du travail ni du capital. Celui-ci, qui rassemble de vraies forces politiques et sociales n'est pourtant écouté par personne malgré ses soubressauts récurrents. Les jeunes, qui le composent pour l'esssentiel, n'y sont jamais pris en compte, jamais considérés.
Pourquoi ?
Entre le début du XX° siècle où il n'était pas rare de travailler à quinze ans et aujourd'hui, ou il est rarrissime de travailler à vingt, nos jeunes ont perdu un peu plus leurs repères et ce n'est sans doute pas un hasard s'ils revendiquent de manière récurrente. Naguère exploités ; peut-être, mais socialement intégrés, on les dénie aujourd'hui dans leur personnalité et dans leur droit à être autre chose que des faire-valoir pour émissions télévisées.
Face à un tel désastre, la prison et les places que nous promettent nos gouvernants n'auront que peu d'effet, si dans le même temps nous ne rompons pas avec notre modèle social et notre bonne vieille opposition entre travail et capital. Si nous ne comprenons pas, avant lui, que ce Tiers Etat qui n'est rien, aspire à devenir quelque chose. Nous aurons de plus en plus de mal à contenir nos banlieues, malgré les renforts de nos CRS, et nous battrons encore des records de suicides et pas seulement en prison.
Ne nous trompons pas de combat, ce n'est pas les retraites qu'il faut sauver: ce sont nos enfants, et la place sociale qui leur est due ! Si nous laissons partir nos usines qui fuient nos charges sociales, nous ne pourrons leur offrir d'avenir, et de surcroît nous mourrons de faim ! Si nous continuons à brimer ce que nous appelons nos jeunes en leur fermant la porte de l'intégration sociale nous ne compterons plus les débordements de fureurs, ou pire encore les actes de désespoirs.
Il faut à tout prix en finir avec le chômage, et en particulier avec le chômage des jeunes. Il faut leur donner un avenir, un rôle et une reconnaissance dans la société. Ou à défaut un salaire, un vrai, qu'ils puissent avoir un toit à eux et y fonder, pourquoi pas, une famille ! Il n'y a pas de raisons pour qu'en France deux mondes du "sans travail" s'opposent aussi violemment : celui des retraités aisés d'une part, et celui des jeunes pauvres et désoeuvrés d'autre part ! Les uns et les autres, au même titre et au même rang devraient avoir les mêmes droits, à la culture, aux transports et aux revenus, aux LOGEMENTS ! "Naissent et demeurent (art 1)...
Nous ne sommes plus dans une société du travail, nous devons en prendre acte, non pas en décrétant le chômage illégal, mais en le supprimant tout simplement. Les gens qui sont sans emploi mettront sans doute des années avant de sortir de là et qu'il n'y a aucune raison pour les punir d'une situation dont ils ne sont pas responsables. Il n'y a aucune raison pour opposer aussi violemment des ayant droits à vie et des "ayant devoirs" perpétuels. Supprimons le chômage et "donnons à chacun selon ses besoins".
En bref : sauvons nos jeunes !
http://www.lemonde.fr/opinions/chronique/2009/08/19/la-menace-du-sans-travail_1229755_3232.html

Aucun commentaire: